
Les cicadelles sont des ravageurs communs en France. Elles peuvent s'attaquer à de nombreux végétaux du jardin d'agrément comme du potager, et sont parfois endémiques dans certaines régions et pour quelques cultures. Leur attaque peut n'avoir que des effets limités si elle est traitée dès le début. En revanche, en cas de forte infestation ou surtout de transmission d'autres maladies virales plus graves, leur présence peut entraîner des effets dévastateurs.
Une mousse visqueuse ou une décoloration des feuilles apparaît sur vos végétaux ? Votre jardin est peut-être victime d'une attaque. Voici comment lutter contre la cicadelle.
Zoom sur les cicadelles
Définition
On appelle cicadelles de tout petits insectes hémiptères (autour de 4 à 5 mm de longueur) appartenant à deux groupes d'espèces : les Cicadellidae et les Fulgoroidae. Seules les premières sont proches des cigales (d'où le nom de cicadelle qui signifie « petite cigale »).
Toutes possèdent des antennes courtes et sont piqueuses-suceuses : elles se nourrissent en prélevant le mésophylle (partie des feuilles comprise entre les épidermes supérieurs et inférieurs) ou la sève dans les vaisseaux conducteurs des feuilles et/ou tiges des végétaux. Elles sont également sauteuses et très mobiles.
Les adultes possèdent deux paires d'ailes qu'ils replient en « toit » lorsqu'ils sont au repos.
Certaines cicadelles peuvent migrer en volant sur plusieurs centaines de kilomètres.
Les cicadelles protègent souvent leurs œufs et leurs larves par une sécrétion pruineuse blanche, comme c'est le cas de la cicadelle blanche, ou muqueuse, par exemple pour la cicadelle écumeuse.
Les larves de cicadelles se nourrissent de la même façon que les adultes. Elles sont mobiles et très actives.
Article
Cycles biologiques
Les cycles biologiques de la cicadelle sont variables selon le type de cicadelle concerné.
Certaines cicadelles, telles que celles responsables de la flavescence dorée de la vigne, n'ont qu'un seul cycle par an. Après l'accouplement, les femelles pondent sous l'écorce des vignes où les œufs restent en diapause jusqu'au printemps suivant. L'éclosion des œufs pondus l'année précédente et restés en diapause (repos biologique) durant l'hiver commence fin avril. Elle est suivie de 5 stades larvaires qui donnent naissance aux premiers adultes vers fin juillet. Ceux-ci vivent environ un mois.
D'autres, telles que Empoasca vitis, peuvent en revanche avoir de 2 à 4 générations par an selon le climat. Ce sont les femelles fécondées qui hivernent sur des végétaux à feuillage persistant (ronces, conifères…) pour retourner pondre sur les nouvelles feuilles de vigne au printemps.
Principales cicadelles et végétaux concernés
De très nombreuses cultures et végétaux peuvent subir l'attaque des cicadelles :
- La cicadelle de la vigne (Scaphoideus titanus) et la cicadelle des grillures de la vigne (Empoasca vitis) font partie des ravageurs causant le plus de dégâts en agriculture.
- La cicadelle pruineuse ou cicadelle blanche (Metcalfa pruinosa) est aussi très présente en France dans les jardins et les vergers. À part les résineux, elle peut s'attaquer à plus de 250 espèces végétales. Elle n'a qu'un cycle par an, mais sa dispersion peut atteindre chaque année 3 kilomètres. Ses œufs donnent des larves présentes de mai à septembre et les adultes sont visibles de juillet à octobre. Elle sécrète un miellat abondant très prisé par les abeilles.
- Les graminées (dont le blé), les composées et les ombellifères, qui comprennent de nombreuses espèces de plantes ornementales ou du potager, peuvent être parasitées par la cicadelle de l'aster (Macrosteles fascifrons).
- Les cultures de betteraves et de concombres peuvent également souffrir de maladies transmises par d'autres cicadelles.
- La cicadelle du rhododendron (Graphocephala fennahi), vert fluo avec un V rouge, très sauteuse, entraîne souvent la présence de fumagine. Elle peut transmettre un champignon déclenchant la brûlure des boutons floraux.
- La cicadelle de la pomme de terre (Empoasca fabae) n’épargne pas les fruitiers tels que les pommiers, les pruniers, les mûriers, les fraisiers ou les légumes tels que les pommes de terre et les haricots.
- Notons que la cicadelle verte (Cicadella viridis) pond sur la couche externe de l’écorce des rameaux en y pratiquant avec sa tarière des blessures visibles.
- Enfin, la cicadelle écumeuse (Philaenus spumarius), qui s'attaque aux ronces et aux rosiers, est surtout connue grâce aux amas muqueux blancs spectaculaires ressemblant un peu à des crachats qu'elle produit avec sa salive et où elle se dissimule pendant sa quête de sève.
Les dégâts provoqués par les cicadelles
Les dégâts occasionnés par la cicadelle sont de deux ordres :
- Des dégâts directs dus aux conséquences de la succion de la sève et à l'action de toxines salivaires, plus ou moins importants selon que ces ravageurs sont nombreux ou pas. Localement, l'action des cicadelles provoque divers signes : décoloration, jaunissement, dessèchement, nécrose, production d'amas pruineux ou muqueux blancs, plaies par incisions sur les jeunes rameaux… Ensuite apparaissent des signes généraux : affaiblissement de la plante avec croissance ralentie, diminution de la floraison, allure fanée, production de miellat…
- Des dégâts indirects qui seront plus dévastateurs en cas de transmissions de maladies virales ou à mycoplasme redoutables, souvent appelées jaunisses. La présence de miellat, qui favorise le développement de fumagine (champignon microscopique), est moins grave pour le végétal atteint.
1. Reconnaissez une attaque de cicadelles
Lors de l'apparition des divers symptômes généraux, variables selon les végétaux attaqués, c'est l'observation directe d'adultes à l’œil nu ou avec une loupe qui vous permettra de faire votre diagnostic avec certitude, l'allure générale des cicadelles étant caractéristique. En effet, les signes généraux d'attaque se retrouvent en présence d'autres ravageurs piqueurs-suceurs, tels que les pucerons ou les cochenilles.
La plupart des cicadelles exécutent des sauts importants dès que l'on essaie de les approcher avec la main ou une baguette. D'autres se cachent immédiatement de l'autre côté de la tige de rameau où elles sont présentes.
Plusieurs espèces sécrètent des amas blancs cireux et fibreux dans lesquels se cachent leurs larves et leurs œufs, qu'on peut apercevoir à l'écrasement. La cicadelle écumeuse produit quant à elle des amas visqueux caractéristiques appelés communément « crachats de coucou ».
2. Luttez préventivement contre les cicadelles
Mieux vaut prévenir que guérir, voici comment anticiper l'apparition de cicadelles sur vos végétaux à risques :
- Évitez les apports d'engrais azotés répétés pour des plantes sensibles et exposées aux cicadelles.
- Plantez à proximité de ces cultures des plantes naturellement insecticides, telles que des géraniums et des pétunias.
- En région d'infestation endémique, n'achetez et ne plantez que des plants certifiés sains par les pépiniéristes.
- En agriculture comme en culture jardinière, des traitements insecticides chimiques préventifs sont couramment utilisés. Ils sont à base de produits labellisés « Emploi autorisé dans les jardins ». D'effet systémique prolongé (3 à 4 semaines), ils sont à mettre en œuvre en deux traitements, une première fois entre début et mi-avril, puis une seconde vers mi-juin. Respectez scrupuleusement les conditions et précautions d'emploi indiquées sur l'emballage.
3. Traitez les attaques de la cicadelle
Si des larves ou adultes sont déjà présents, vous devrez effectuer un traitement insecticide par contact. Pulvérisez au préalable le dessus et le dessous des feuilles avec de l'eau sous pression pour éliminer mécaniquement le plus de parasites possible. Répétez ce traitement 3 à 4 fois par saison si des insectes adultes réapparaissent.
Traitements respectueux de l'environnement
- En agriculture biologique, on pratique souvent des pulvérisations répétées de solutions de savon noir, de purin de rhubarbe, d'ortie, d'huile de neem ou de suspensions liquides d'argile.
- Vous pouvez également employer d'autres méthodes naturelles, car physiques, telles que le piégeage des adultes volants avec des plaques jaunes (couleur qui les attire) enduites de colle extra-forte, ou lorsque c'est possible (pour une véranda ou une serre par exemple), avec des filets fins, type moustiquaire.
- Contre la cicadelle blanche uniquement, la mise en place de « nids » de Neodrinus typhlocybae, un hyménoptère microscopique prédateur naturel de ses larves, est efficace mais demande à être poursuivie plusieurs années pour éradiquer les populations de ce ravageur.
Autres traitements
Vous trouverez dans les commerces spécialisés de nombreux traitements à effet choc ou systémique :
- Certains sont labellisés « utilisables en agriculture biologique ». Ils contiennent de l'huile de colza et des pyréthrines, mais ne sont pas spécifiques aux cicadelles et sont actifs également contre les pucerons, les aleurodes, les cochenilles ou les acariens. Préconisés pour les arbustes et arbres d'ornement ou pour les cultures florales, ils peuvent détruire également les insectes auxiliaires (butineurs et prédateurs naturels).
- Parmi les traitements choc, des produits à base de deltaméthrine (dont le fameux Decis) ne sont à utiliser qu’exceptionnellement, avec beaucoup de précaution, et surtout pas en période de floraison tant ils sont néfastes pour l'environnement.
- Pour les mêmes raisons, des produits à base de thiachlopride ou d'organophosphorés ou d'autres pyréthrinoïdes (dont la Lambda-cyhalothrine) qui ont une action systémique prolongée pendant environ 4 semaines et qui sont autorisés pour des arbustes d'ornement ne sont à utiliser que sur de jeunes pousses ou bien en dehors des périodes de floraison.
- Les néonicotinoïdes, thiaméthoxame, chlorantraniliprole…, bien qu'ils soient d'usage plus récent, sont également systémiques en plus de leur fort effet choc sur les insectes adultes et présentent les mêmes inconvénients.
Important : depuis le 1er septembre 2018, l’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ou des substances présentant des modes d’action identiques est interdite. Cette interdiction a été contestée par de grands groupes industriels mais par une décision en date du 6 mai 2021 (C-499/8P), la Cour de justice de l’Union européenne a définitivement validé l’interdiction de trois insecticides néonicotinoïdes: le clothianidine, le thiamethoxane et l’imidaclopride. De plus, à compter du 1er janvier 2020, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des zones habitées est subordonnée à des mesures de protection des personnes habitant ces lieux (article L. 253-8 du Code rural et de la pêche maritime, issu de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018).